Les îles sont des territoires  placés sous la  souveraineté d’Etats, qui ont choisi un développement  propre. Ces politiques  sont très diversifiées, inspirées des réalités  locales ou des enjeux  économiques. Certains ont fait le choix du tout  business, d’autres se sont  souciés de préserver leur environnement et  leur culture identitaire, avec des  réussites différentes. 
 
BALEARES
Les Baléares sont un archipel espagnol qui a  privilégié le «business».
Les meilleurs investissements ont été réalisés   pour établir les infrastructures, capables d’attirer les touristes du  monde  entier. Rien n’a été laissé au hasard pour améliorer le trafic,  l’accès à l’eau  douce, le confort, le réseau routier… 
 La conscience publique et les législations   îliennes des Baléares se sont souciées d’empêcher les spéculations  immobilières  sur les terres intérieures, des atteintes aux paysages et à  l’écosystème.
L’archipel est connu pour être un territoire de   fête et de folles soirées. Comme si Satan s’était domicilié là où  coule la  liqueur et l’argent. Le haut niveau de développement  économique a fini par  attirer une clientèle aisée, tout au moins  disposée à «dépenser le maximum d’argent,  dans le moindre temps». Il y  a peu d’opposition à ce développement  du business.
SEYCHELLES
La «baléarisation»  a été contestée par  d’autres pouvoirs  publics, qui ne voulaient pas faire de leur île un  équivalent de cet archipel.  Les Seychelles sont un exemple à l’opposé.
L’archipel s’est principalement soucié de son   environnement écologique qui fait la réputation des Seychelles pour son   esthétique et son identité culturelle.   Toutes les zones et toutes les  îles ne sont pas ouvertes au tourisme.  Les règlementations foncières  veillent à une cohérence entre les ressources de  l’île et leur  population, un équilibre entre l’activité des hommes et leur   environnement. On ne rentre pas dans l’archipel sans réservation dans un  hôtel  ou dans un gîte d’hôte. Le camping est interdit. La vie civile  n’est pas mêlée  à une consommation par les touristes recherchant des  produits de souvenir.
Les Seychelles sont un mode de vie, dans un   environnement de grande beauté. La population vit dans un   cosmopolitisme propre aux populations créoles, où le touriste étranger   n’apparaît pas comme une personne pittoresque. 
 Ces îles ont une réputation de destination  luxueuse. Pourtant, on  observe aussi la pauvreté et l’ennui. C’est une espèce  d’Afrique avec  une population extrêmement disciplinée.
DJERBA
Djerba est un morceau de désert, sans  ressources et sans eau. Gilbert TRIGANO disait d’elle: « une Polynésie à deux heures de Paris».  Les lois foncières,  basées sur les traditions djerbiennes, ont    longtemps préservé le cachet particulier de l’île. De très longues   plages, au sable fin avec des dunes blanches, renouvelées chaque jour,  laissaient  une impression de paysage de neige au bord de la mer. Les  eaux peu profondes  donnent une pleine sécurité de baignade,  particulièrement pour les petits  enfants. Il n’y a pas la  tradition de   villes, organisées autour de prestigieux lieux de pouvoir public.  Leurs pouvoirs  sont décentralisés autour de la vie dans les manoirs.  Les Djerbiens sont  essentiellement des ruraux qui vivent dans les  campagnes, à l’intérieur des  terres, autour de «Houchs» construits en  dur. Les chemins sont encerclés de  haies de barbarie, appelées  «tabbias», caractéristiques du paysage végétal  djerbien.  Les  constructions renforcées,  la protection de «tabbias» centenaires, le  modèle d’autarcie, le système  autonome de récupération des eaux de  pluies… devaient assurer la sécurité et  les besoins de leurs habitants.  Pendant longtemps, les mythes du scorpion  assassin, de la chouette  avide des yeux d’enfants, où manque l’eau et coule la  djerbienne…  effrayaient les continentaux, tandis qu’une autre image de Djerba  était  promue aux touristes occidentaux. L’île est aussi un rythme où la  vitesse  était limitée à 60km/h. Vous ne trouverez pas de feu rouge. Le  succès  économique a bouleversé l’équilibre de l’île. Djerba s’urbanise.  L’exploitation  du Mont Chakhch en tant que carrière a détruit une  montagne qui limitait  l’érosion des dunes et des plages. La destruction  des «tabias» par ceux qui  veulent élargir leurs terres porte atteinte  au paysage. L’abandon des Houchs,  les spéculations sur la terre, les  constructions incohérentes ou illégales…  ont pris le pas sur les  valeurs du patrimoine ancestral de Djerba. Pourtant,  une conscience  publique existait depuis longtemps, avec une législation  foncière  inspirée des traditions locales.
La simplicité de ces lois, les modèles de   production, l’homogénéité des comportements, l’absence de pouvoir  central…  avaient constitué les éléments d’une préservation du cachet de  Djerba. Voici  que les politiques de développement viennent perturber  sérieusement le  cachet qui a fait sa particularité. L’autoroute à  quatre voies amène la  vitesse; la destruction des «tabbias»  centenaires réduit l’intimité et la  sécurité des habitants; la  tolérance publique à l’égard des infractions et des  pratiques de fait  accompli, l’absence d’un pouvoir d’intérêt public pour  Djerba… risquent  de lui faire perdre ses atouts.  
 CORSE
Quant à la Corse, elle est l’exemple extrême  d’un souci de  préservation de leur île, dont les militants n’ont pas  hésité à utiliser la  violence. Il y a, me semble-t-il, une faible    tradition de propriété terrienne. La vie pastorale est enracinée dans la   culture des paysans. Les bergers font paître leurs animaux sur des  terres  collectives. Un système coutumier appuie les solidarités et les  sentiments  identitaires. Ceci a préservé la beauté naturelle de l’île  de Corse. Or, cette  beauté attire des stars qui viennent y construire  des villas avec des murs,  souvent inoccupées! Ces constructions gâchent  la liberté des bergers et  entravent la beauté naturelle du paysage.  Une partie de la population a immigré  et s’est constituée en diaspora  de travailleurs sur le continent et à  l’étranger. Ils sont réputés pour  occuper des fonctions publiques et  administratives. La violence qui se  manifeste indique une crise entre le  système coutumier qui tente de se  maintenir et les obligations d’une vie  moderne axée sur la notion de  propriété.