En hiver, il faut s'adapter aux horaires "de bureau" qui engloutissent la partie du jour où il fait clair, pour nous enfermer dans des locaux éclairés artificiellement durant les moments de la journée où une activité de plein air serait possible. On doit partir et revenir du bureau dans l'obscurité, parce que le soleil ne prétend pas s'adapter à notre mode de vie uniformisé.
Pour la campagne, on peut se procurer facilement et à faible coût une légère et ergonomique lampe frontale rechargeable; en ville, c'est éclairé, mais les sols rigidifiés provoquent des chocs dans les articulations contre lesquels j'ai enfin découvert la parade: des chaussures de marche avec "amorti", une nouvelle technologie qui permet un bénéfice pour la musculation du dos et donc l'état général comparable à la marche sur des sols plus naturels et élastiques, comme en forêt ou dans les chemins de terre.
Cet environnement anormal dans lequel nous devons vivre et travailler a même provoqué la retraite du célèbre chef amazonien Raoni, qui a déclaré au journal Le Monde en septembre dernier qu'il allait arrêter de venir dans nos pays développés parce que notre environnement civilisé lui cause des problèmes de santé: "Quand je marche ici, j'ai mal aux genoux, je dois prendre des médicaments"(2).
Par contre, le député CD&V ne doit pas être lui-même un marcheur, sinon il saurait que la marche, une activité physique, donne chaud: ceux qui ont besoin de "vêtements très chauds" sont les usagers des transports en commun qui doivent poireauter immobiles aux gares et arrêts dans l'attente de leur moyen de transport...
Notre mode de vie nous rend la marche difficile et fatiguante, parce qu'il nous contraint ou nous encourage à nous asseoir sans cesse: bureau, voiture ou transports en commun, télévision le soir. C'est ainsi que nous perdons progressivement notre capacité de marcher: les cartilages des articulations, non vascularisés, ont besoin que nous bougions pour déclencher les mécanismes physiologiques d'entretien incorporés à notre organisme; nos muscles, qui pilotent nos articulations, fondent lorsqu'on ne les utilise pas, comme ceux qui animent notre coeur et de notre respiration.
Rentrant à pied du travail chez moi à la campagne, j'avais salué un fermier des environs juché sur son tracteur dans sa ferme, que la voie publique traverse, en lui signalant que je me rendais au village, à quelques kilomètres. Son air compatissant par rapport au chemin qui me restait à parcourir montre que la sédentarité handicape même ces travailleurs qui vivent au grand air.
Quand j'étais enfant, mon père médecin emmenait toute sa famille en promenade le dimanche dans la campagne ou la forêt; les voisins du cru regardaient cette activité comme une lubie de gens de la ville.
(suite page 4)
( suite de la page 1)
On me répond encore régulièrement qu'on n'a "pas le temps" de marcher. Par contre, on a bien le temps de braver les embouteillages pour courir sans résultat les
hôpitaux et les pharmacies afin pouvoir ingurgiter des médicaments inopérants et toxiques, parce que c'est valorisé par notre société et que cela coûte de l'argent remboursé, donc on s'imagine faire une bonne affaire...
Reste à convaincre, pour dégager la ville de ces nuisances sonores et aéropolluantes - les esclaves de la voiture (dont je faisais encore partie récemment) de
l'abandonner. Depuis que je marche également en ville, je regarde ces mastodontes dans lesquels des humains s'enferment volontairement (les chats eux, moins éduqués, sentent le piège et tentent de s'en échapper par tous les moyens!) comme des chars conduits par des culs-de-jatte, qui enragent de devoir y rester, et que je plains.
Vraiment, il serait temps de passer à autre chose. Non, les voitures de société ne doivent pas devenir électriques comme le suggère l'informateur socialiste Magnette, il faut purement et simplement désactiver ce mécanisme pervers, qui force des navetteurs contraints par des horaires fixes à venir systématiquement embouteiller les villes aux heures de pointe, pour jouir obstinément de leur avantage en (contre) nature socialement valorisé, à tort.
Sachant que l'employeur qui a cofinancé avec l'État cet ex-signe de réussite sociale devenu un emblème de l'autisme climatique et de l'égoïsme crasse ne pourra jamais leur rembourser en sus le trajet en transports en commun... D'où l'exaspération de ces conducteurs, dont on connait bien les marques et modèles puissants préférés, des butors particulièrement discourtois.
Pour ma part, j'admire plutôt les parents qui dans certains quartiers très urbanisés se faufilent à vélo dans la circulation entre les 4X4 avec leur précieuse progéniture dans de fragiles remorques en tissu au ras de la chaussée. Plus intelligents et informés que la moyenne, courageux, ils montrent l'exemple et contribuent à nous construire un avenir... un peu moins pire.