Le hic, c’est que l’ordonnance prévue n’a pas concerné les véhicules en question mais les véhicules EURO 6 qui bénéficiaient d’un délai jusqu’au 1er janvier 2028 ! Comment en est-on arrivé là alors que l’ordonnance a fait l’objet de multiples débats et a été votée ou refusée par la plupart des députés régionaux ?
EXPLICATION
Voici le texte de l’ordonnce votée le 4 octobre, sanctionnée le 17 et publiée le 22 au MB :
Art. 2. A l'article 3.2.16 de l'ordonnance du 2 mai 2013 portant le Code bruxellois de l'Air, du Climat et de la Maîtrise de l'Energie, inséré par l'ordonnance du 7 décembre 2017, les modifications suivantes sont apportées:
(…)
2° l'article est complété par un paragraphe 6 rédigé comme suit:
« § 6. Les véhicules à moteur de la catégorie M1, M2 et M3 de classe I, classe II, classe III, classe A, classe B, et de la catégorie N1-I, N1-II et N1-III, N2, N3, L1, L2, L3, L4, L5, L6 et L7 qui répondent aux normes visées à l'article 5, § 1er, 3°, troisième colonne de l'arrêté du 25 janvier 2018 relatif à la création d'une zone de basses émissions ou aux normes supérieures sont autorisés à accéder à la zone de basses émissions jusqu'au 31 décembre 2026.
Ce texte fait référence au tableau publié dans l’arrêté du 25 janvier 2018 relatif à création d’une zone de basses émissions.. Le problème, c’est que ce tableau ne concerne pas les interdictions à partir du 1er janvier 2025 mais celles à des dates ultérieures.
Pour modifier, il fallait se référer aux dispositions précédant le tableau et qui visaient bien les interdictions au 1er janvier 2025 !
Voici le texte de l’arrêté
Art. 5,§ 1er. Sans préjudice du paragraphe 2, compte tenu des émissions de polluants atmosphériques du véhicule concerné, l'accès à la zone de basses émissions est uniquement autorisé pour :
(…)
d) à partir du 1er janvier 2022 jusqu'au 31 décembre 2024 :
1) dont le moteur diesel répond au moins à l'euronorme V ou 5, 5a ou 5b ;
2) dont le moteur à essence ou au gaz naturel répond au moins à l'euronorme II ou 2 ;
3° à partir du 1er janvier 2025, en fonction de leur catégorie, carburant et norme euro, les véhicules tels que mentionnés dans le tableau suivant selon l'échéancier déterminé par le même tableau : (…)
Il ne fallait donc pas faire référence au tableau qui concernait les véhicules autorisés à partir du 1er janvier 2025, mais simplement modifier la date reprise au point d et la remplacer par 31 décembre 2026 pour permettre aux véhicules EURO 5 Diesel et EURO 2 essence de continuer à avoir accès à la ZBE.
Elémentaire, direz-vous ! Sauf qu’aucun député ne s’en est rendu compte et qu’aucun n’a fait une lecture complète du texte proposé.
Cela en dit long sur leur compétence ou leur niveau d’attention. Cela en dit long également sur les méthodes de modification des textes qui font référence à d’autres dispostions sans les reprendre in extenso.
LA SUITE
Le résultat de cet embrouillamini est que les véhicules qui devaient être visés ne le sont pas et sont donc en infraction et que les véhicules qui étaient prolongés de trois ans ne le sont que de deux ans !
Une proposition d’ordonnance de réparation a donc été rédigée et soumise à l’avis du Conseil d’état qui s’est ému de son objet. Il a en effet considéré que la propostion portant sur le report effectif de deux ans pour les véhicules EURO 5 diesel et EUR 2 essence portait atteinte à la clause de standstill qui ne permet pas de réduire les droits fondamentaux, ici le droit de bénéficier d’un environnement sain (art.23 de la Constitution). Cette interprétation n’est pas sérieuse pour une mesure qui n’est pas entrée en vigueur, du moins matériellement ; par ailleurs, son application interdirait toute modification ou évolution future et peut conduire à une immixtion disproportionnée des juges dans l’action du législateur.
Aussitôt, GROEN et ECOLO, toujours en pointe dans ce dossier et qui n’ont toujours pas avalé l’intiative de la plupart des députés qui ont voté le principe du report en se prenant toutefois les pieds dans le tapis, ont applaudi, toujours très respectueux des milliers de Bruxellois concernés par cette interdiction.
On peut dès lors craindre qu’un recours soit introduit à la Cour constitutionnelle, mais celle-ci se prononcera dans deux ans, soit quand la mesure de prolongation aura expiré !