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COUPE NET
Banc Public n° 58 , Mars 1997 , Serge KATZ
Le passage, parfois brutal, à ce que d’aucuns ont nommé l’ “ère du silicium”, après avoir étendu le marché de l’information à des perspectives qui semblent sans limites, conduit à maintes inquiétudes. L’extension d’un marché gigantesque mettant en jeu de nouveaux pouvoirs et de nouvelles connexions à l’échelle mondiale pourrait-il, s’il demeure incontrôlé, faire vaciller les institutions les plus universelles - ou au contraire reste-t-elle un instrument aux mains de celles-ci ? Banc Public a interrogé pour vous un spécialiste qui infiltre depuis longtemps le milieu des pirates du vingtième siècle.
Banc Public On se pose beaucoup de question sur la finalité du Net. Mais il existait des modems bien avant la popularisation que l’on connaît aujourd’hui, et par conséquent, tout une histoire des réseaux d’information. Monsieur Wolf - votre nom de cybernaute -, vous travaillez à l’évolution des réseaux depuis de nombreuses années, avant même que la question du contrôle par l’Etat ou les entreprises se pose comme à présent. Alors! Peut-on contrôler le Net ?
Wolf Impossible...
BPÂ Pour quelles raisons ?
W.: C’est là l’idée des institutions telles que le FBI. Mais c’est impossible parce que quelqu’un qui se connecte, c’est un élément en plus que l’on ne peut contrôler tout de suite. Se connecter, c’est déjà faire circuler de l’information. L’exemple le plus simple, c’est celui de ce fameux livre, je crois sur Mitterand. Un petit malin s’est amusé à le reproduire au scanner et à le divulguer sur Internet. Ce bouquin ne pouvait évidemment pas être reproduit. Il y a eu une procédure en justice, mais elle n’a jamais abouti.. et ils n’ont jamais pu arrêter la divulgation parce que, bien sûr, quelqu’un qui a eu l’accès au fichier peut toujours le réintroduire un jour ou l’autre dans le réseau. Les éléments vont partir et revenir et donc on ne peut rien contrôler. Une fois que l’information est lancée, elle est partout. C’est fini.
BP: Peut-on, d’après vous, exploiter facilement le Net dans sa dimension purement commerciale ?
W:. Bien sûr ! De la même façon que dans le monde “ réel ”. La prostitution, la drogue, l’argent, le nettoyage de l’argent... Les banques travaillent aujourd’hui avec le Réseau. On peut ouvrir un compte avec un pseudo quelconque du style “ Blanche Neïge ”, comme c’est arrivé il y a peu en Suisse. Internet a accéléré les choses dans ce domaine. On peut verser n’importe quoi n’importe où sous un faux nom. Tu ouvre un compte sous un pseudo et tu le fais voyager pour le récupérer enfin. Tout le monde n’y verra que du feu.
BP.: Les grandes banques de données, officielles, scientifiques etc. sont-elles bien gardées ou demeurent-elles accessibles ? W.: Elles seront toujours accessibles. Il y aura toujours, comme ailleurs, le volé et le voleur. Cela s’appelle le cracking. Quand on ne sait pas entrer par la porte, on entre par la fenêtre. On utilise aussi un cheval de Troie. On entre par la première porte, on laisse un programme, on ressort, et on rentre à nouveau grâce au programme que l’on a laissé à l’intérieur. Ce ne sera jamais fini. Maintenant c’est à la portée de tout le monde, même des gosses... Avant il y avait des serveurs bien précis avec un numéro de téléphone. Maintenant tout le monde peut essayer. Par ailleurs, les gosses naissent maintenant dans un milieu informatisé. Cela ne fait donc que commencer.. Il y aura de plus en plus de pirateurs... Mais il y aura aussi des données que l’on ne pourra jamais décrypter. Et comme on ne saura jamais décrypter toutes les données, on ne pourra jamais tout contrôler. On ne peut pas contrôler une information si l’on ne sait pas en quoi elle consiste... C’est cela le problème des Américains qui veulent le contrôle sur toutes les données. Mais c’est considéré comme une atteinte à la vie privée. Les gens ne veulent pas. Le but serait d’obliger les gens à donner la clé d’accès de certaines données. Mais aucune loi, à ma connaissance, ne va en ce sens, puisque c’est encore considéré comme une atteinte à la vie privée... En ce cas, tu ne mens pas vraiment, sinon par omission, mais ce n’est pas interdit par la loi.
Serge KATZ |
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Biblio, sources...
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