Ils insistent pourtant sur les «hauts niveaux de la part du profit inhabituellement répandus aujourd'hui», sur cette «marge d'une importance sans précédent», sur cette «preuve à la fois graphique et économétrique d'un fait particulier concernant le partage des revenus dans les pays industrialisés: une poussée à la hausse de la part des profits au milieu des années 80, et symétriquement, une poussée à la baisse de la part des salaires».
Ce sont donc les financiers eux-mêmes qui dressent ce constat, avec étonnement: jamais les bénéfices n'ont été aussi hauts, jamais les salaires n'ont été aussi bas, un déséquilibre inédit depuis au moins un demi-siècle, et vrai pour l'ensemble des pays industrialisés.
Et cette analyse ne souffre d'aucune contestation: d'après le Fonds Monétaire International, dans les pays membres du G7, la part des salaires dans le Produit Intérieur Brut a baissé de 5,8% entre 1983 et 2006. D'après la Commission européenne, au sein de l'Europe cette fois, la part des salaires a chuté de 8,6%. Et en France, de 9,3%. Dans le même temps, la part des dividendes dans la valeur ajoutée passait de 3,2% à 8,5%. Un quasi-triplement.
Ces 8,6 % paraissent abstraits mais représentent en fait des montants colossaux – qui ont des conséquences très concrètes dans notre vie quotidienne. Alors que les trous dans la sécu sont amplement médiatisés, on évoque moins souvent ceux creusés par les actionnaires dans la poche des salariés…: cette donnée majeure est quasiment effacée de la sphère publique, éclipsée dans les médias, à peine mentionnée par les politiques.