Conditions de l' emploi
Les critères de sélection pour l' emploi sont devenus excessifs, parfois contradictoires, voire ironiques; exigeant à la fois formation et expérience compétence et dynamisme - aptitudes et moyens - sérieux et motivation... Les offres dans la presse sont un exemple d' annonces, présentant de belles mises-en-page, avec des propos flattant l' entreprise, vantant son dynamisme, proposant des opportunités de carrières qui nécessitent des aptitudes exceptionnelles, enfin... tout pour décourager les modestes gens. Ces entreprises engagent-elles autant de gens qu' elles le réclament? Le poids des réponses indiquerait la promotion déguisée d' un marketing «bon marché», aux dépends des chercheurs d' emploi, de leur énergie, de leur argent et de leur mental.
La compétence du chômeur
Les chercheurs d' emploi ont la compétence de leur métier ou de leur savoir-faire. Ils offrent leurs services ou leur force de travail. Mais la relation au travail s' est complexifiée. L' importance de la demande a justifié les caprices de l' offre. Les conditionneurs d' emploi font leur fine bouche. Ce n' est plus au travail que les compétences sont appréciées mais dans la présentation des compétences que la personne est jugée! Pour gagner l' emploi, il faudra donc définir son parcours, l' obligation de le mettre en valeur, avoir les aptitudes à se vendre et à s' adapter au référencement... tout un métier, organisé autour de la mise en valeur du candidat pour répondre aux conditions de sélection. Il n' appartient plus à chaque homme d' apporter sa contribution dans la société par le travail, mais à chaque emploi de trouver la personne la mieux apte. La conséquence est la marginalisation d' un nombre de gens, souvent les mêmes; celles qui n’ont pas acquis leur formation en Belgique, qui ne pratiquent pas le néerlandais, qui n' ont pas la bonne présentation, pour ne pas dire «morphologie».
Les contraintes de la législation
La législation établit des restrictions et interdictions. Elle considère que le demandeur d' emploi «profite»d' une allocation financière, en échange d' une recherche active de l' emploi, d’une présence domiciliaire, permanente et isolée, qu' un cumul d' activité complémentaire n' est pas toléré. Le chômeur indemnisé n' a pas le droit d' entreprendre quelconque rôle de commerce/service, de gestion, d' administration de société, d’engagement dans quelconque projet dans l' art, l' associatif, le culturel ou l' aide au développement au risque d' une sanction sur son droit aux ressources. Il doit donc rester en solitude, ne voyant personne, ne travaillant avec personne, peu importe qu' il n’ait pas accès aux biens, que son alimentation soit peu équilibrée... dans sa petitesse, il a l' avantage d' une modeste stabilité, bien que la misère psychologique ne soit pas saine pour le corps social.
Vision publique sur l' emploi
Les responsables publics sont conscients d' une insuffisance de l' emploi. Avec de bonnes intentions, certains justifient le désintérêt pour la recherche d' un travail insuffisant. Le marché de l' emploi aurait atteint ses limites. En réalité, le travail est élastique à la population et à l' équivalent de ses besoins. Ce n' est donc pas le travail qui manque mais le financement de son emploi. Le potentiel humain est donc là , non utilisé. En d' autres temps, ces ressources auraient été réquisitionnées pour les besoins de l' agriculture, de la guerre ou de l' émigration.
Les politiques keynésiennes ont répondu à ces difficultés; faisant travailler les ouvriers avec les avantages de soutenir l' activité économique, de constituer les infrastructures publiques, de favoriser les possibilités de relance. Ces politiques continuent à inspirer nos gouvernements, mais sans la considération des implications positives pour l' homme et sa collectivité. Les allocations financières soutiennent l' activité économique sans contribuer au travail et à toutes ses valorisations. Elles entretiennent des frais peu productifs, voire spéculatifs, sans favoriser les possibilités de relance. Elles brisent la communication et atomisent une population croissante, au risque de multiplier les conflits et d' empiéter sur la cohésion sociale. L' équation publique risque de devenir infernale, en plus d' augmenter le coût des intermédiaires, de ruiner le capital de relance économique, de mettre à mal le corps social. D' où l' intérêt à considérer une gestion publique qui s' appuie sur une«théorie des besoins», basée sur l' observation simplifiée des besoins actualisés d' une société, avec identification des dépenses selon les catégories sociales, de rationalisation des charges et des priorités. Une vision portée sur les besoins contribuerait aux économies d' échelles et à la réduction des déficits publics... CQFD avec les prisons hollandaises (voir articles précédents).
Un autre inconvénient est d' utiliser le taux du chômage comme critère d' appréciation économique... Celui-ci ne signifie pas la santé économique pour un pays. Il serait même risqué de le considérer en ce sens, car un tel concept impliquerait la volonté de diminuer son taux pour démontrer la performance économique! Les moyens utilisés passeraient aussi par de sournoises manipulations de chiffres, de maquillage ou d’exclusion de personnes, avec leurs conséquences sur le corps social. Certaines victimes véritables tomberaient à charge d' autres caisses de soutien, avec risque de conflits institutionnels opposant l' office du chômage aux caisses d' aide publiques ou de Mutuelles, sans amélioration des conditions économiques. Ainsi, le chômage devrait être considéré comme une caisse collective, relativement souple, principal lieu de disponibilité, de mise au travail; ainsi que l’identification des aptitudes, la définition des projets de vie à mettre à disposition de la collectivité mais aussi de soutien et de coordination avec les autres institutions (santé, entreprise formation, aide publique...).
Libertés aux initiatives
Les conditions de l' emploi devraient être facilitées, réduites au simple rapport d' une offre et d' une demande, d’un emploi et d’un travail, d’un contrat et d’une rémunération, d' équipe et de collaboration, de formation et de loyauté, d' essais et de désengagement. L' employeur définit son besoin, les tâches à effectuer. L' agent de l' ONEM envoie son candidat. L' un explique le travail, les conditions, le lieu, le salaire. L' autre propose un contrat, vérifie l' aptitude, la disponibilité, organise la rencontre. Si l' engagement se fait dans de bonnes conditions, l' employé redevable donnerait son plein dévouement au travail. Si l' employeur est satisfait, il signe un nouveau contrat avec le candidat. S' il ne l' est pas, il stoppe ou ne renouvelle pas le contrat.
Tous les services de l' État ou de l' entreprise ont besoin d' une main-d' ½uvre, partielle, occasionnelle, en vue d' assumer une surcharge de travail. Quoi de mieux qu' engager à bon marché, en complément des allocations de chômage, dans cette caisse des ressources humaines, pour une prestation de quelques mois, de quelques semaines ou de quelques jours. La satisfaction serait générale, pour le bénéficiaire (entreprise) qui profite d' un apport en travail économique; de l' employé (chômeur) valorisé pour quelques temps, il percevra mieux le sens de notre économie de marché; et l' employeur (ONEM) qui gagne un flux financier provenant de ses services.
La majorité des chômeurs veut travailler, recherche un emploi. Il est possible que certains soient indisponibles ou ne justifient pas d' une recherche active, qu' ils s' avèreraient découragés, isolés, incompétents à la recherche d’emploi, voire même non désireux de travailler et ce n’est probablement pas par fainéantise mais par une hiérarchisation de leurs intérêts. Ils auraient des raisons de santé ou de psychisme, de difficultés ou de juridisme, d' activité familiale ou d’engagement complexes. D' autres entreprendraient un projet d' intérêt manuel, social, artistique, littéraire qu' ils ne peuvent pas déclarer, au risque d' être sanctionnés par l' office du chômage. Pourtant, la collectivité aurait tout intérêt à valoriser l' homme, à l' accompagner dans un projet de vie ou à l' aider dans son entreprise, aux dépens d' un projet de carrière qu' il ne peut assumer. Certaines personnes aimeraient lancer un projet indépendant dans le commerce/services dans l' associatif - dans l’aideau développement - dans un projet culturel/artistique/littéraire. Ces belles volontés, initialisées dans un projet déterminé, soutenues par l' institution publique et la fondation privée, apporteraient des satisfactions individuelles et collectives.
Dans les projets de commerce, ceux qui voudraient tenter l' expérience de l' indépendant, un statut hybride, souple, avec un accès à la TVA, permettrait de déclarer les ressources de quelques jours par mois, en complément des journées chômées. Le succès des entreprises de chômeurs est faiblement satisfaisant. Certaines expériences ont montré une facette d' exploitation, du rendement au pourcentage où les risques sont essentiellement pris par les demandeurs. Il est donc inutile de croire aux illusions. Le statut d' indépendant est lourd, peu recommandable à des entrepreneurs sans capital et sans ressources. Nombre d' entre-eux gagnent à peine l' équivalent d' un chômage alors qu' ils sont soumis à des charges d' entreprises. L' État n' ignore pas et ne peut pas ignorer leurs difficultés. Les entreprises sont au c½ur de notre construction et de notre prospérité économique. Le désintérêt de l' État à leur égard serait de réduire le nombre des entrepreneurs et de renverser la charge publique. L' intérêt public devrait préserver la continuité du projet économique, soutenant que les difficultés de l' indépendant ne signifient pas l' échec du projet d’indépendant. Les difficultés de gestion ou de succession de l' entreprise ne devraient pas conduire aux liquidations ou à la fermeture mais survivre aux crises et aux personnes. Les facilités de la succession ou de la remise, les amnisties ou l' accompagnement complémentaire seraient mieux rentables à la collectivité. Elles permettraient aux bonnes volontés de préserver l' héritage économique et de l' intégrer dans un projet d’avenir. Une transition est nécessaire pour permettre au nouvel entrepreneur d' adapter progressivement son activité aux obligations de l' entreprise indépendante.
Quant aux projets associatifs, ils ne peuvent être entrepris par des chômeurs et ne peuvent profiter de subsides avant deux ans d’activité, tout en sachant qu' il est illusoire de croire au gain de subsides après deux ans d' activité. Pourtant, la société est en de perpétuels mouvement et changement. Les personnes de la base ressentent des incohérences ou des besoins. Ils aimeraient porter un projet de société par l' action sociale, l' idée intellectuelle, l' expression musicale, culturelle ou artistique. Ils n' ont de solutions que clandestine et non durable car ces sentiments ne trouvent leur concrétisation après un certains bail, que le pouvoir public ne veut pas établir.