Les armées africaines sont cependant venues en appui et ont joué un rôle important à côté des forces françaises. En 2014, la situation paraissait figée. En 2015, la situation reste très tendue et les derniers évènements de Bamako, avec la mort d’un fonctionnaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ne permettent pas d’envisager une pacification à court terme. La moitié du Mali, grande comme la France, est difficile à contrôler et la porosité de ses frontières nord, est et sud permet le passage de groupes terroristes, extrêmement dangereux pour la stabilité du pays et de ses voisins. A travers la situation au Mali, c’est donc toute la région du Sahel qui est menacée.
La pression et les crimes du groupe islamiste BOKO HARAM au Nigéria et au Cameroun, voire au Tchad ou au Burkina, sont également préoccupants pour la stabilité de toute la région et simplement pour le respect des hommes et des femmes qui y vivent. Les crimes de ce groupe et sa brutalité sont en effet inadmissibles comme est également peu compréhensible l’inefficacité relative de l’armée du pays le plus peuplé d’Afrique et de ses services de renseignement. C’est donc également la question de l’efficacité de l’Etat qui est posée comme elle est posée également dans de nombreux pays africains. En effet, le développement est entravé par l’absence d’un Etat efficace et non corrompu.
En Centrafrique, après la grave crise de 2013-2014, la situation parait se calmer. Les dernières élections ont pu se dérouler dans le calme. Mais là aussi, il est illusoire de rapatrier à court terme les forces françaises et celles de l’ONU. Dans ces deux pays, la présence de forces étrangères reste indispensable pour éviter le chaos.
Au Burundi, le président a fait modifier la Constitution afin de pouvoir briguer un troisième mandat. Cette initiative a provoqué des troubles importants faisant craindre le pire pour l’avenir du pays. Les pourparlers entre les différents pays de la région n’ont guère abouti et le Burundi s’enfonce de plus en plus dans la crise. Tout cela s’accompagne de nombreuses exactions et crimes. Les dirigeants africains, en voulant s’accrocher à tout prix au pouvoir en niant les règles constitutionnelles, provoquent des crises destructrices de la démocratie naissante et accréditent l’idée que le pouvoir en Afrique ne se partage pas et ne se remet pas.
Notons que les voisins du Burundi, la RDC et le Rwanda, sont tombés dans le même travers. La démocratie africaine est donc très malade et cette fois, les Européens ou les Américains ne portent guère de responsabilité. C’est donc aux Africains de prendre la mesure du problème et de le régler, comme ils l’ont fait au Burkina en empêchant le président de se représenter.
Je ne peux terminer ce tour d’Afrique sans rappeler la transition difficile des pays arabes et des révolutions qui n’ont guère produit les fruits qu’on attendait. La Libye, après le soutien des rebelles par les Occidentaux et la chute de son dictateur, est tombée dans un chaos indescriptible, voire dans une partition de fait, qui interpelle par ailleurs sur l’imprudence des interventions purement militaires sans analyse plus précise de la situation du pays. L’Egypte, après une courte période sous un gouvernement islamiste et une reprise en mains musclée, est retombée dans un régime militaire, similaire à celui qu’elle connaissait avant sa révolution. La Tunisie seule parait mieux s’en sortir : après elle aussi un passage sous un gouvernement islamiste, elle a pu renouer, sans violence et en respectant les règles démocratiques, avec un nouveau gouvernement. Malheureusement, elle a été secouée par deux attentats qui rendent sa transition très fragile et reste donc menacée par des groupes radicaux d’autant plus facilement qu’elle partage une frontière avec la Libye.
Enfin, le dernier sommet Chine-Afrique qui s’est tenu en décembre à Johannesburg a démontré que les relations entre les deux continents sont difficiles et que leur lune de miel est bien révolue. Les Chinois, comme naguère les Européens, sont accusés de piller les richesses naturelles, de fournir en compensation des prestations de faible qualité et de mettre l’Afrique en coupe réglée. Les Africains se prennent à rêver au règne des Européens ; ce serait cependant une mauvaise solution, car ils doivent avant tout prendre eux-mêmes leur avenir en mains sans se mettre sous la dépendance de l’un ou de l’autre. Bref, si le partenariat entre la Chine et l’Afrique n’est pas remis en question, il doit être rééquilibré.
Or, c’est bien dans un ensemble euro-africain que l’avenir de l’Europe et de l’Afrique se joue, à côté d’un ensemble asiatique et d’un autre américain.
Je me plais souvent à rappeler que le maintien du français comme langue mondiale et internationale se joue en Afrique, dont le français est une des trois grandes langues avec l’arabe et l’anglais. Le dernier sommet Chine-Afrique à Johannesbourg en décembre 2015, comme le dernier sommet de la Francophonie de 2014 qui a lieu à Dakar, ont permis de rappeler cette présence francophone en Afrique. Rappelons également que la Belgique, par l’intermédiaire de la Communauté française, est le troisième contributeur de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), après la France et le Canada. Rappelons enfin que le nombre de Francophones a doublé depuis 1990 et atteint près de 275 millions et que le nombre de Francophones dépassera les 750 millions en 2060 ! Le français renforce donc constamment sa place de langue africaine et de langue mondiale.