- pour la destruction des écosystèmes, les mécanismes sont bien installés et mus par des forces terriblement puissantes liées à des profits conséquents pour des multinationales et les ouvriers qu'elles rémunèrent, résultant d'une forte demande, souvent manipulée, de consommateurs;
- en ce qui concerne le climat, qui est un des facteurs de cette destruction, l'aspect le plus dangereux est l'emballement: les facteurs du réchauffement moyen de la planète, les fameux gaz à effet de serre, persisteront dans l'atmosphère même si l'on parvenait à cesser d'en produire, et la déstabilisation continuera même si l'on arrêtait toute pollution supplémentaire. N'en déplaise à M. Trump, qui se base non sur la science mais sur ses sensations dans la vie courante, cela ne va pas "finir par refroidir" mais au contraire continuer à chauffer de plus en plus fort.
On peut noter, parmi les mécanismes qui nuisent à la prise de conscience mondiale de la gravité de la situation, le fait que les principaux effets de ces mécanismes de diminution de la viabilité de notre planète Terre sont les plus visibles dans des régions de celle-ci distinctes et éloignées de celles qui les causent par l'action de leurs industries.
Des vols vers... nulle part !
Et il est clair que la prise de conscience mondiale n'a pas encore eu lieu: comment expliquer sinon que des compagnies aériennes, en inactivité forcée à cause de la crise du coronavirus et des restrictions aux déplacements internationaux qu'elle impose, se mettent à organiser des "vols vers nulle part", comprenez : dont l'aéroport de départ est le même que celui d'arrivée, qui rencontrent un franc succès (1) ! C'est anecdotique, mais cela n'aurait jamais été proposé, compte tenu de l'atteinte à l'image de marque des compagnies aériennes concernées, si une réelle prise de conscience mondiale du désastre résultant de ces gaspillages d'énergie avait déjà eu lieu, même si l'on pourrait argumenter que ces vols sans séjour épargnent temporairement aux destinations touristiques leur destruction par le tourisme de masse...
Coronavirus et changements de mode de vie
La grave crise du coronavirus, dont la survenue pourrait être liée à la dégradation de notre environnement – un aspect mentionné notamment dans l'engagement de 60 pays dont la Belgique à élaborer un plan comprenant des actions immédiates pour "protéger la nature et mettre un terme à la disparition galopante de la biodiversité d'ici 2030" (2) –, a eu le mérite de nous montrer qu'un changement radical de notre mode de vie était tout à fait possible, et même quasiment instantanément ! Presque plus de déplacements, plus d'école, de fast food, une grande partie du commerce et de l'industrie à l'arrêt... excusez du peu ! Cela prouve en tous cas que des changements énormes et non cosmétiques sont possible quasi instantanément, si l'humanité a conscience d'un péril grave.
Extinctions
Or, les atteintes environnementales sont en train de réaliser une extinction de masse de la vie sur Terre. Entre autres désastres phénoménaux, on apprend à présent via une étude allemande publiée dans la revue Nature d'octobre 2019, citée dans un article du Nouvel Observateur (3) que "La biomasse des arthropodes [dont font partie les insectes] a diminué en dix ans en Europe de 67 % dans les prairies et de 41% dans les forêts". Quand on sait que ces petits animaux sont à la base de la chaîne alimentaire d'une grande partie de la faune, il y a de quoi être effaré ! M. Trump pourrait énoncer qu'il ne serait personnellement pas dérangé que les mouches cessent de l'incommoder, mais, pour les scientifiques, c'est un élément de plus démontrant "la 6e extinction" d'animaux sur la planète (les précédentes s'étant produites antérieurement à l'avènement de l'humanité) ; l'homme en tant qu'espèce fera vraisemblablement partie de la 7e.
En ce qui concerne les insectes, une cause nouvellement identifiée de ce déclin spectaculaire seraient les ondes GSM :
"Le rayonnement des téléphones portables et des réseaux sans fil tels que le Wifi provoquerait en particulier chez les insectes l’ouverture des canaux calciques des cellules, entraînant une importante introduction d’ions calcium dans l’organisme. Ce calcium à forte dose déclenche des réactions en chaîne chez les insectes et un « stress cellulaire », selon l’étude".
Parmi ces réactions figureraient « une altération du sens de l’orientation et une diminution de la capacité de reproduction ». « Le rythme jour-nuit est perturbé et le système immunitaire est mal activé », soulignent en outre les auteurs du rapport. « Des études menées en Grèce montrent également que le rayonnement des téléphones portables est nettement plus nocif que le champ magnétique d’une ligne électrique à haute tension ».
Disproportions
On ne peut qu'être frappé en consultant la presse de l'intérêt que peuvent susciter des sujets comme le sauvetage d'un chiot nouveau-né abandonné dans un sac poubelle (4), quand on pense aux millions d'animaux en pleine santé détruits dans les méga-feux de forêt en pleine expansion sous l'effet du réchauffement climatique dans les parties naturelles encore préservées de notre planète, en Australie, en Russie, en Amazonie, en Amérique du Nord..
Cela confirme à la fois l'intérêt du public pour la vie animale, mais aussi la difficulté à penser la catastrophe en cours à l'échelle planétaire, qui suscite apparemment moins d'intérêt des lecteurs de journaux; cette difficulté est sans doute liée à l'impuissance que l'on ressent face à une destruction d'une telle ampleur, à la puissance des forces auxquelles il semble difficile de s'opposer, mais dont nous sommes pourtant les donneurs d'ordre en tant que consommateurs ou actionnaires, à l'importance des changements à effectuer dans notre mode de vie, certes extraordinaire, mais qui ne nous rend pas vraiment heureux.