Un optimisme dû certainement à la solide construction d'une enfance heureuse, comme troisième et dernier enfant d'un couple discret et modeste, Maria et Jan Cooreman-de Leeuw, tous deux nés en 1896. Garçon manqué, elle joue avec son frère Louis sous la surveillance de l'aînée Jeanne à Laeken, du 16 juin 1928 à 1940 puis à Overijse lorsque les bombardements allemands font fuir de nombreux Bruxellois à la campagne. A ce moment, Léonia Cooreman est déjà Nini Cordy, abbréviation de son patronyme proposée par les s½urs Ambrosini, filles du maître de ballet du Grand Thâtre Royal de la Monnaie (l'opéra de Bruxelles) au cours de danse privé desquelles sa maman l'a inscrite par prétendue «nécessité de fortifier ses muscles insuffisamment développés» et pour canaliser son trop-plein d'énergie qui perturbe les cours – par des blagues notamment - aux s½urs Ursulines, où elle est une excellente élève, sauf en discipline.
Avant d'avoir cette première affiche à son nom, à 12 ans, elle a entrepris et réussi en plus de la danse le chant et donc le solfège, un parcours «académique» comÂparable à celui de nombreux petits belges. C'est à Paris où elle débarque avec ses valises à la gare du Nord le 1er mai 1950 qu'elle deviendra «Annie», dans le cadre d'une carrière de meneuse de revues de cabaret et Music Hall ayant débuté à «l'Ancienne Belgique», à Bruxelles, puis traversé Knokke-Le Zoute, Cologne, etc.
Gentille, ponctuelle, travailleuse exigeÂante, comique sans-gêne ou tragédienne de qualité, elle est fort appréciée dans la profession et développera à partir de 1953, parallèlement à sa carrière de fantaisiste, une carrière dans le cinéma entamée avec son copain Bourvil, qui comportera par exemple le troisième rôle du célèbre film «Le Chat».
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Le Chat
«Le Chat» est un film franco-italien réalisé par Pierre Granier-Deferre en 1970 d'après un roman de Georges Simenon. Les rôles princiÂpaux sont tenus par deux monstres sacrés du cinéma français, Simone Signoret et Jean Gabin, qui interprètent un couple vivant en huis clos dans un pavillon de la banlieue parisienne cerné de builings en construction, chez qui la passion de la haine a remplacé celle de l'amour fou après une longue indifférence, lorsque la dame, une ex-acrobate de cirque devenue infirme, a tué par jalousie le petit chat receuilli par son compagnon, un ancien ouvrier typographe, qui cesse alors de lui adresser la parole.
A la fin de la nuit et du film Simone Signoret meurt puis son mari Jean Gabin désespéré se tue, abandonÂnant ainsi sa nouvelle maîtresse, la jeune tenancière d'une maison de passe du quartier, interprétée par Annie Cordy.
Grâce
Annie Cordy connaît rapidement des succès mondiaux, et, après avoir chanté le 19 avril 1956 au mariage du prince Rainier de Monaco avec l'actrice américaine Grace Kelly, elle fera avec son mari une tournée en Amérique du Sud et à New York.
Celui-ci – un deuxième amour épousé en 1958 après que sa mère Maria ait menacé d'un revolver le premier, un dompteur de cirque aux yeux bleus prénommé Gérard, sur une plage de Hollande où elle les avait surpris peu avant la majorité de sa fille (21 ans à l'époque) - s'appelait François-Henri Bruneau, un agent parisien, mari dont les différentes sources biographiques que nous avons consultées mélangent allègrement nom et prénoms, puisque notre star nationale l'appelait tout simplement «Bruno». Agé de 17 ans de plus que notre star, il est décédé d'une crise cardiaque en février 1989.
La carrière d'Annie Cordy est exceptionnelle: 500 titres enregisÂtrés, 4.000 galas à travers le monde, des opérettes, des comédies musicales, des rôles à la télévision, au cinéma au thâtre…C'est une artiste aux talents multiples et à l'énergie débordante!
La chute
Une anecdote récente assez extraordinaire témoigne du punch de cette artiste qui paraît souvent plus jeune sur les photos actuelles que sur celles des débuts de sa carrière: voici la version de l'incident telle quelle a été publiée sur le site internetpurepeople . .
«Annie Cordy : une chute qui aurait pu lui être fatale!
News publiée Le Mardi 10 Février 2009 à 12:02
Mardi dernier, le 3 février, Annie Cordy, la pétillante chanteuse belge de 80 ans, est dans son appartement parisien du 12e arrondissement.
En compagnie de son chien Nougat, l'interprète de Tata Yoyo et la Bonne du curé vaque à ses occupations. Le drame se produit tard dans la soirée, lorsqu'elle entreprend de descendre les escaliers. Annie loupe malenÂconÂÂtreusement la troisième marche et dévale la totalité de l'escalier, jusqu'à la porte d'entrée. Le choc est tel qu'elle est laissée quasi inconsciente.
Par chance, sa nièce, de passage chez elle, a le temps de prévenir les secours. Annie est revenue à elle, mais elle souffre terriblement. Elle sera transporÂtée à l'hôpital, où elle subira une batterie d'examens. Au final, rien de grave: quelques contusions et un hématome impressionnant sur la joue gauche.
Un petit accident qui n'a pas entamé la joie de vivre de notre octogénaire. Malgré les conseils des médecins, Annie a en effet décidé de reprendre la tournée Age tendre et têtes de bois, dans laquelle elle triomphe depuis mars 2008. Elle a juste beaucoup forcé sur le maquillage et le tour a été joué! Quelle pêche.
Et puis, celle qui avait été caricaturée sous les traits de Nicotine, femme du chef de village belge Gueuselambix, dans l'album Astérix chez les Belges, a plein de projets.
Francis Perrin doit mettre en scène, fin 2009, son prochain one-woman-show: Laissez-moi sortir! Alors Annie n'a pas le temps pour les jérémiades.
Celle qui continue ses exercices de barre au sol quotidiens, ainsi que le stretching, est décidément une force de la nature...»
Baronne
Notre Souverain Al Berdeu l'a nommée baronne le 11 octobre 2004. Son blason comÂprend deux épis de blé (pour Cooreman, littéralement «l'homme du grain» en Flamand, c'est-à -dire son papa qui était charpentier, et deux lions pour sa maman dont le nom de jeune fille était «de Leeuw», le lion, en belge également. Pourquoi deux lions? «car c'était une femme très énergique»…
Belge
Elle ressemble ou fait penser à beaucoup de femmes belges comme une jolie tante actuellement arrière-grand-Mère, une maman (aujourd'hui bonne-maman) mal coiffée…
Sa nièce Mimi (pour Michèle), la fille de sa s½ur Jeanne, qui est aussi sa filleule, lui «tient lieu de fille» et l'appelle «P'tite mère» «sans que ma s½ur Jeannette en soit jalouse». Quand elle était petite, sa qualité première était pour elle «Marraine sent bon».
Mimi est actuellement l' «agent, secrétaire et attachée de presse» (p. 106) de celle qui aime se présenter comme Nini la Chance (voir par exemple en pages de garde). C'est elle qui a conçu et gère le site internet de l'artiste (annie-cordy.com).
Conclusion
Le livre de Christian Dureau, agréablement illustré de nombreuses photos couleur et noir et blanc, se termine par près d'une vingtaine de pages consacrées à la filmographie puis aux comédies musicales d'Annie Cordy, illustrées par les affiches des spectacles, et à sa discographie.
Apportant une vision condensée d'une très belle carrière de 70 années déjà aux multiples facettes, muni du soutien de l'ami Charles Aznavour (qui signe une préface), il incite à penser que cette artiste est bien plus importante et de qualité que ce que son image de fantaisiste un peu «tête à claques» ne se prenant pas au sérieux nous laissait distraitement supposer.