Le moine Martin Luther rédigea contre les indulgences 95 thèses affirmant avec force que nous sommes sauvés, non par des dons en argent ou des messes dites en notre nom, mais par la seule grâce de Dieu, dont personne ne connaît les choix, contestant ainsi la prétention des prêtres à pouvoir monnayer l'accès au Paradis.
Au XVIe siècle, dans une société encore dominée par la violence, les épidémies, la peur de la mort et de l'enfer, alors que la Renaissance apparaît progressivement, des bandes de mercenaires (guerres de Cent Ans et d'Italie) massacrent les plus faibles avant d'acheter leur entrée au purgatoire ou au paradis. Les protestants l'appellent commerce des indulgences et y voient un cercle vicieux violence-pardon.
Des millions de messes sont dites chaque année par les prêtres, contre rétribution, pour des particuliers. Seuls les plus riches peuvent se payer l'espoir d'accéder au Paradis quoi qu'il arrive. Certains prêtres vivent dans le luxe, revendent à d'autres leur droit à dire des messes, et ne mettent même plus les pieds dans leurs paroisses.
À la même époque, en Suisse, le Pape afferma le commerce des indulgences à un moine franciscain, Bernardin Samson. Par ce trafic, beaucoup d'argent sort de Suisse, ce qui déplaît aux autorités civiles. Les Suisses se sentent dès lors disposés à comprendre la colère de Luther contre les indulgences. Dès 1524, seulement sept ans après les 95 thèses de Luther, Zurich devient la première ville prise par la Réforme. L'indulgence détourne les pécheurs de leur véritable devoir, la charité et la pénitence, et la «querelle des Indulgences» sera une des causes principales du schisme du XVIe siècle entre catholiques et protestants.
Plus de deux cents ans plus tard, aux Lumières, Voltaire revient sur le commerce des indulgences pour consacrer l'article Expiation de son Dictionnaire philosophique (1764) à l'histoire et à la critique de la pratique des indulgences, en accusant le pape Jean XII qui, selon lui, «faisait argent de tout».