Or ni l'Union européenne ni la France ne semblent vouloir une quelconque indépendance dans le domaine vis-à-vis de l´allié étasunien. En avril 2020, sous prétexte de l´etat d´urgence sanitaire, les données de santé des Français ont été transférées à... Microsoft, sans mise en concurrence et bien entendu sur les conseils de... McKinsey. Le 16 juillet 2020, l´accord sur la protection des données entre l´Europe et les États-Unis est invalidé par la Cour de justice de l´Union européenne, au motif que la protection des données personnelles n'est pas garantie aux États-Unis (arrêt SCHREMS II). Cette folle velléité d´indépendance ne dure pas : par une décision du 10 juillet 2023, la Commission a décrété que les États-Unis ont apporté des modifications suffisantes à leur législation. Les transferts de données peuvent désormais s´effectuer librement. Rien, évidemment, ne sera contrôlé par la partie européenne. Ce nouvel accord ne change rien au fond. La législation américaine permet aux autorités et aux services de surveillance américains de consulter les données personnelles et de les réquisitionner sans aucune supervision ni autorisation judiciaire. C´est en particulier le cas de la NSA (Agence nationale de la sécurité), chargée du renseignement d´origine électromagnétique.
L´association NOYB (None of your business), dirigée par l´Autrichien Max SCHREMS, saisit une nouvelle fois la CJUE : "La définition de la folie est de répéter les mêmes actions en espérant un résultat différent. Le dernier accord repose non pas sur des changements concrets, mais sur des considérations politiques."
Nous déléguons aux États-Unis non seulement le développement des IA, mais également les tâches de cybersécurité qui en dépendent. En effet, les systèmes de défense sont de plus en plus automatisés et leur fonctionnement repose sur l´IA. Dépendre entièrement, pour la cybersécurité, d´un autre pays, fût-il allié, est suicidaire. C´est particulièrement vrai en cas de conflit : quid si l´accès à l´IA est coupé ?